J’ai passé le week end à Givors à côté de Lyon avec la famille de Fakraddine Zaraï, ce jeune mort dans sa cellule, le 8 août dernier, à la prison de Saint Quentin Fallavier, dans des conditions on ne peut plus troubles.
Fakraddine était à quelques jours de sa sortie à l’issue d’une peine de huit mois durant laquelle le bracelet électronique lui avait été refusé, par la juge d’application des peines, ainsi que la libération conditionnelle au motif que le certificat d’embauche, présenté dans le dossier, venait du mari de sa sœur.
Pour précision cet homme dirige une entreprise sérieuse et florissante.
La famille a été prévenue 12 heures après le drame, ce qui est inacceptable, a du lutter bec et ongles, durant un mois ½ afin de récupérer les affaires personnelles de Fakraddine et pour ce faire a du faire appel au procureur de la République pour être enfin entendue.
Une enquête est actuellement en cours.
L’article D 427 du CPP pose le principe qu’en cas du décès du détenu, de maladie mettant ses jours en danger, d’accident grave ou de placement dans un établissement psychiatrique, la « proche famille doit en être immédiatement informée ».
Une chose me semble certaine, c’est que suicide ou mort suspecte, il est intolérable qu’une personne détenue meure en prison et, qui plus est, lorsqu’elle demande à travailler ou à bénéficier du bracelet électronique.
Une marche à été organisée à Givors à laquelle se sont jointes de nombreuses personnes en soutien à la famille. A l’issue de la marche, j’ai pris la parole au nom de l’ARPPI, Association pour le Respect de Proches de Personnes Incarcérées, dont je suis la présidente.
Je me suis adressée à tous ceux et celles qui étaient présents, mais en particulier aux nombreux jeunes venus pour la terrible occasion, afin de les sensibiliser sur le fait qu’ils pourraient être un jour les prochains Fakraddine si ils se trouvaient incarcérés.
A tous j’ai tenté de faire comprendre l’importance de savoir pourquoi à l’avenir ils ne voudront pas aller en prison.
Puis, pour légitimer mes paroles, je leur ai parlé de mes deux fils en prison et en particulier de Cyril qui la veille de mon départ pour Givors devait sortir en permission.
Je leur ai raconté un bout de notre histoire.
« Avant hier 13 novembre à 8 heures du matin l’épouse de Cyril qui se trouvait devant la prison de Liancourt, pour l’accueillir dés sa sortie, m’appelle affolée pour me prévenir que Cyril n’est pas sorti comme prévu parce qu’il a été transféré à l’hôpital dans la nuit.
Cette scène est carrément indescriptible tellement l’angoisse était énorme.
A ce moment précis seule l’image de la mort de Fakraddine planait devant mes yeux.
J’ai téléphoné partout et à tout le monde. Le service des urgences de l’hôpital m’a raccroché au nez, le surveillant pénitentiaire qui parlait à ma belle fille, et que j’entendais bredouiller au bout du fil, n’a pas voulu me prendre en ligne.
C’était l’horreur totale en ce jour qui devait être jour de fête.
J’ai fini par savoir à 10 heures 30 après deux heures et demie d’angoisse que Cyril était vivant et qu’il avait été enchaîné comme une bête à un lit d’hôpital alors qu’il aurait du être en permission. Et pourtant, Cyril qui a fini par sortir après avoir signé une décharge et avec des heures de retard et bien que la juge d’application des peines ait refusé une prolongation de sa permission, m’a dit après quelques heures passées avec lui et ma petite fille, de venir vous rejoindre ici pour vous soutenir puisque je m’y étais engagée ».
Puis, Nabila la sœur de Fakraddine qui avait organisé la marche et m’y avait invitée, Nadia Soltani du (collectif Belgacem) qui a également perdu son frère en prison ainsi que Karine Bergne ( Faites la lumière en détention) qui a perdu son époux, le père de sa petite fille, sont intervenues à leur tour pour interpeller les personnes présentes, en particulier les jeunes, sur le douloureux sujet du suicide en prison.
Quant au maire de Givors, qui s’était déplacé pour l’occasion, il a eu les mots justes et a rappelé avec beaucoup d’émotion dans la voix les chiffres liés au suicide en prison et la réalité du délabrement carcéral.
S’il reste très difficile de s’opposer à l’offensive sécuritaire et au discours la concernant, il y a néanmoins urgence, pour les membres de l’ARPPI et tous les acteurs de la cause carcérale, à se mobiliser pour faire évoluer les mentalités sur le sujet du suicide en prison et celui de la réinsertion.
Il est important de faire comprendre aux plus nombreux que la réinsertion n’est ni un cadeau , ni une faveur faite aux personnes détenues mais une nécessité absolue. Quant au suicide c’est l’évasion ultime qui place l’administration pénitentiaire face à un échec mais aussi toute la société en face de celui ci.
La prévention de l’un et la promotion de l’autre passent obligatoirement par le maintien des liens familiaux parce que nous, familles et proches, sommes les meilleurs garants de celles ci.
Il incombe à l’état d’assurer le suivi des actes qu’il réprime et il doit pour cela donner les moyens aux instances politiques et administratives travaillant sur la problématique carcérale afin qu’elles puissent œuvrer concrètement au maintien effectif des liens familiaux.
A ce moment seulement, familles et proches de personnes détenues pourront mettre en œuvre une aide pleine et efficace pour que nos proches incarcérés n’essaient plus d’attenter à leurs jours et puissent enfin souscrire et adhérer durant la détention, au contrat social, en vue de leur libération.
article en date 23 novembre 2008 écrit par catherine mère de detenus et fondatrice d’une association pour le respect des proches de detenus: ARPPI )
Rouen : une femme en prison pour le vol de quatre parfums
Nkaluda B., petit bout de bonne femme aux cheveux tressés, comparaissait récemment devant le tribunal correctionnel de Rouen (Seine-Maritime). Le 4 février dernier, la sécurité d’une parfumerie du centre-ville de Rouen (Seine-Maritime) l’avait repérée en train de subtiliser quatre flacons de parfum pour un préjudice de 360 €. Fait aggravant, elle avait dissimulé son butin dans un sac doublé de feuilles d’aluminium pour que les alarmes ne se déclenchent pas.
Habituellement, ce genre de délit se règle en composition pénale, voire en « plaider-coupable ». Mais la justice avait choisi le tribunal des flagrants délits, la comparution immédiate. La quadragénaire a refusé d’être jugée hors la présence de son avocat parisien et son affaire a été renvoyée au 5 mars prochain. Mais en attendant, elle a été incarcérée.
Pourquoi cette application stricte de la loi ? Parce que le casier judiciaire de Nkaluda B. est aussi long qu’un jour sans pain. Avec 15 condamnations depuis 1999, dont 14 pour des vols ou des délits associés, la dame fait figure d’habituée des prétoires.
« Qu’avez-vous à dire sur les faits qui vous sont reprochés ? », demandait le tribunal. « Si vous pouvez m’excuser pour ce que j’ai fait… » « Mais le tribunal n’est pas là pour vous excuser, mais pour vous juger, pour décider s’il faut ou non vous envoyer en prison ». « Mon mari ne travaille pas. Il est séropositif et reste à la maison. Je suis coiffeuse et ne gagne que 600 € par mois. Je vous jure que je viendrais le jour de mon procès. Si je ne suis pas là, mes trois enfants seront tout seuls ».
« Pour éviter toute réitération des faits, je requiers le mandat de dépôt », détaillait le procureur de la République. Son appel a été entendu et la quadragénaire, pour le vol de quatre flacons de parfum (et qui encourt, parce qu’elle est en récidive, une peine plancher), devra patienter un mois en prison avant de connaître son sort.
en date du 11 février 2012
source : http://www.paris-normandie.fr/article/rouen/rouen-une-femme-en-prison-pour-le-vol-de-quatre-parfums