Clémentine est venue tirer la sonnette d’alarme pour dénoncer les conditions de détention de la maison d’arrêt.
« Il est mal. Je ne suis pas bien. Que puis-je faire pour lui de l’extérieur ? »
« Mon concubin est en prison. Il assume. Mais il n’a pas à être traité comme il l’est actuellement. » Clémentine* a poussé notre porte avec détermination, mardi après-midi. « Je souhaiterais dénoncer les conditions de détention de la maison d’arrêt de Châlons-en-Champagne », a-t-elle déclaré. « Que les détenus paient leur dette à la société en étant privé de liberté, c’est une chose. Qu’ils subissent de mauvais traitements, infligés par des surveillants zélés quand ils ne résultent pas de la vétusté de l’établissement, ç’en est une autre. Cela me choque. Nous sommes quand même en 2013 ! Je ne conçois pas pareilles pratiques dans un pays démocratique comme le nôtre. » Et d’énumérer ces « petites choses » poussant son amoureux à lui confier : « Ils veulent me faire péter les plombs. » « Les surveillants de la maison d’arrêt ont la réputation de se prendre pour des Dieux. Détenus, ex-détenus, familles de détenus et même avocats s’accordent sur ce point-là : les matons châlonnais font la pluie et le beau temps dans la prison. Ils testent les détenus, n’hésitant pas à les provoquer. Ils cherchent à savoir jusqu’où ils peuvent aller. » Elle illustre son propos d’exemples : « Ils vont mettre 5 minutes de plus pour les descendre en promenade. Quand j’apporte des CD à mon concubin, ils ne les lui remettent que trois jours plus tard. » Les conditions de détention valent elles aussi que l’on s’y attarde : « Il n’y a ni rideau, ni volet aux fenêtres. Quand le soleil donne dans les cellules pendant tout un après-midi, c’est épouvantable. Sans compter que les détenus n’ont droit qu’à trois douches par semaine. Imaginez le tableau, avec la canicule… » Elle poursuit : « N’y tenant plus la semaine dernière, les détenus ont demandé à pouvoir passer à la douche. Le surveillant, auquel ils s’étaient adressés, a catégoriquement refusé. Il leur a dit que s’ils n’avaient pas commis un délit, ils ne seraient pas derrière les barreaux. Ils pourraient alors, comme lui, prendre une douche quotidienne ! » Pas étonnant que son compagnon ait demandé son transfert au tout nouveau centre de détention de Villenauxe-la-Grande (à côté de Troyes).
« Nous sommes maltraités »
Dans un article paru le 24 avril dernier, nous relations des propos similaires, tenus par un détenu qui nous téléphonait avec un portable depuis sa cellule. « Nous sommes maltraités, nous n’en pouvons plus », affirmait-il. « Les surveillants nous insultent, nous donnent des coups, nous humilient. Si nous ne plions pas, ils nous le font payer. Ça fait 20 ans que je suis au placard. Des prisons, j’en ai déjà fait un paquet. Mais celle de Châlons bat un triste record. Dans les chenils, les animaux sont mieux traités. » De la même manière, Me Jean-François Delmas, qui défend les intérêts de Marcel Guillot (le détenu le plus âgé de Châlons et de France), s’indignait des conditions de détention de son client dans notre édition du 19 juin 2013. « Il a perdu une trentaine de kilos depuis son placement en détention provisoire et déjà fait deux infarctus. » À se demander ce qui trame derrière les portes du pénitencier. * Clémentine est un prénom d’emprunt