En avril 2012, des prisonniers du centre de détention remettent anonymement à la juge d’application des peines et au directeur du centre de détention de Roanne une lettre de revendication dans laquelle ils exigent un certain nombre de mesures qui remettent en question le fonctionnememnt et l’existence même de la prison, notamment la fin du mitard, du prétoire, de l’isolement, des régimes fermés, qui sont les moyens de pression et répression dont dispose l’Administration Pénitentiaire. Ils mentionnent aussi le système de racket des cantines, l’exploitation dans les ateliers de travail, les contraintes liées aux parloirs, etc. [Cette lettre disponible ici.] Elle est diffusée largement, et distribuée devant cette taule et devant d’autres. Un rassemblement de soutien a également lieu sur place, à l’extérieur.
Le même week end, la presse rapporte plusieurs évènements : la tentative de suicide d’un prisonnier, un autre est accusé d’avoir balancé un frigo sur des surveillants. Il demandait des comptes parce qu’ils l’ont empêché à plusieurs reprises de sortir en promenade. Il est salement tabassé par plusieurs matons, prend un mois de mitard, puis passe en procès au tribunal de Roanne. Il est condamné par la justice à deux ans fermes supplémentaires.
[Le compte rendu du procès est disponible ici.]
Peu de temps après, une lettre publique faite par un prisonnier explique mieux quel est le quotidien au centre de détention. Au mois de novembre 2011, il avait été à l’initiative de pétitions qui critiquaient entre autres les fouilles aux parloirs et l’exploitation dans les ateliers de travail. Suite à cela, la direction le met en isolement durant 3 mois, puis le maintient 5 mois en régime fermé. Pour finir, quand le tapage fait autour de sa situation devient dérangeant pour l’administration pénitentiaire et se mêle à d’autres évènements il est transféré. [Sa lettre est disponible ici.]
Elle explique entre autres comment l’administration pénitentiaire et les surveillants s’y prennent pour tenter d’isoler et briser les prisonniers récalcitrants.
Malgré cela la résistance se manifeste de multiples manières.
Le 4 juillet, il y a un blocage de promenade, qui est suivi d’un tabassage par les matons qui interviennent. La scène est filmée par des détenus, d’autres balancent sur les matons des projectiles en solidarité avec ceux qui ont refusé de remonter. Les personnes en question étaient confinées en régime fermé, et le blocage intervient à un moment où un énième changement concernant les horaires de promenade a été décidé par l’AP.
Quelques jours après, la vidéo est diffusée très largement sur internet, accompagnée d’une lettre explicative écrite par des prisonniers. [Elles sont visibles ici.]
La presse officielle a parfois relayé certains évènements, dont une partie de la lettre de revendication et le moment du blocage, ce qui a fait circuler ces informations de manière plus large, en mettant bien entendu en avant le point de vue des syndicats de surveillants et de l’administration pénitentiaire.
Peu après, des affiches sont collées dans la ville, revenant sur le blocage en donnant notamment le nom des matons qui ont tabassé. Cela crée un scandale dans la ville, les journaux relayent cette histoire donc tous les prisonniers sont au courant car le journal est distribué gratuitement en prison ( même s’il est justement censuré ce jour là). [Les affiches sont visibles ici.]
Le lendemain, les matons déclarent qu’ils sont en insécurité.
Les ERIS (matons en uniformes de robocop) prennent le relai, les prisonniers sont fermés en cellule toute la journée, les promenades et activités sont supprimées, les parloirs retardés et pour certains supprimés, la gamelle servie tardivement, etc.
Les surveillants sont insultés et menacés par de nombreux prisonniers en colère, il y a plusieurs départs de feux, un blocage d’étage, le centre de détention est en ébullition. Puis la routine reprend son cours.
Au cours de l’été, une ballade a lieu à Lyon, en solidarité avec des luttes de prisonniers. Un tract est distribué dans la rue, l’antenne du SPIP ( ceux qui s’occupent de réinsertion) est trashée. [Un compte rendu plus détaillé est disponible ici.]
A la rentrée, le tribunal de Roanne est taggé, de l’inscription du nom d’un maton gradé, puis “tu veux des balances tu n’auras que notre haine, feu aux prisons”. [Information de la presse officielle ici : leprogres.fr/loire/2012/08/21/le-tribunal-de-roanne-tague]
Plus tard, des dispositifs incendiaires sont retrouvés devant le tribunal, l’un a attaqué la porte d’entrée du tribunal, l’autre n’a pas fonctionné. Ces faits paraissent dans le journal local, qui les met en relation avec les évènements survenus au centre de détention. [Information de la presse officielle ici : leprogres.fr/loire/2012/10/02/des-cocktails-molotov-devant-le-tribunal-de-roanne.]
En septembre également, un des prisonniers qui avait participé au blocage de promenade pendant l’été sort de prison. [Une interview de lui est diffusée au dehors, on peut l’écouter ici.] Il parle du blocage, de comment les matons leur ont ensuite mis la misère.
Il explique aussi que depuis la rentrée un nouveau major a été nommé dans le bâtiment, et qu’il a serré la vis à tout le monde. En veillant à l’application à la lettre du règlement intérieur, ce qui a pour résultat que de nombreux prisonniers passent en commission disciplinaire ( ou prétoire, sorte de tribunal interne à la prison ) pour des broutilles comme fumer ou manger dans les coursives. Il conduit également des fouilles de cellules massives, ce qui a de nombreuses conséquences. Des tensions permanentes, la perte de confiance dans des liens entre prisonniers, et des passages au prétoire qui génèrent des peines qui vont de jours de mitard avec sursis à des mois de prison fermes qui se rajoutent, pour du shit, des téléphone portables ou des chargeurs, des clés USB ou autres objets trouvés en cellule et interdits en détention.
Pour exemple la situation d’une femme qui ramasse 10 mois fermes et 14 mois de sursis supplémentaires pour la possession d’un téléphone portable. [Information de la presse officielle ici leprogres.fr/loire/2012/11/08/dix-mois-ferme-pour-une-detenue-qui-cachait-un-telephone-dans-son-vagin.]
L’administration pénitentiaire a bien sûr d’autres armes de son côté pour tenter de faire régner la peur et la soumission. Rechercher et utiliser des balances, faire miroiter des carottes ( permissions de sortie, possibilité de libération conditionnelle, remises de peine) en plus du bâton qu’elle manie bien.
Un blocage de rue en solidarité avec les prisonniers qui luttent a lieu à Roanne à l’automne, un tract est distribué à 500 exemplaires dans des boites aux lettres de la ville. Il précise notamment qui sont ceux qui font tourner le centre de détention, et quelle place il a dans cette ville. [Plus de détails ici.]
Début décembre, une camionnette eiffage est incendiée, et de l’huile pour moteur est déversée devant la taule avant l’heure de relève du matin des matons. [Plus de détails ici].
L’administration pénitentiaire veut isoler les personnes qui résistent, et étouffer les informations qui pourraient sortir de leurs murs. Pour cette raison, elle censure l’entrée de certains journaux, ou celle du quotidien régional en fonction des informations qu’il contient.
Mais les témoignages et informations diverses qui sortent de l’intérieur et de l’extérieur de la prison circulent autant que possible sur les médias alternatifs, et sont repris notamment par des émissions de radio anticarcérales.
L’administration pénitentiaire tente par tous les moyens d’écraser ceux qui ne baissent pas les bras, multipliant les attaques à l’intérieur. Isoler en quartier disciplinaire ou par des transferts, tabasser, maintenir en privation, rajouter des mois ou des années de prison, ils font leur sale boulot et ils en ont tous les moyens. Par la même occasion, ils veulent effrayer et soumettre l’ensemble des prisonniers. Malgré cela, les résistances se manifestent au quotidien, de diverses manières ( refus de réintégrer la cellule, refus d’obéir aux ordres, sabotage divers comme par exemple la boite aux lettre des matons qui sert à recueillir les bons de cantines pour EUREST qui se trouve emplie d’excréments ), etc
Nous sommes solidaires de ces résistances, et voulons les renforcer !
Pour détruire toutes les prisons, pour ne pas laisser les porcs en paix.
Pour que ceux qui résistent, (et leurs bourreaux), sentent qu’ils ont des appuis au dehors.
Pour influer dans ce rapport de force en tension permanente, toute initiative est la bienvenue !!!
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[source: Indymedia Nantes le 30 décembre 2012]